Vite, au boulot


30 minutes pour passer de la passerelle de l’avion à la sortie du parking de l’aéroport : Singapour m’étonnera décidément toujours. Personnel souriant partout pour vous aiguiller dans les couloirs, sécurité qui vous sourit et vous offre un bonbon, wifi gratuit pour checker vos mails, 5 minutes pour les bagages (les deux miens sortent en troisième position, il faut dire, j’ai de la chance), me voilà avec Alexandre roulant vers la ville.

Singapour-Day1-ChangiBon, je sais, je vais annoncer un paquet de banalités lors ces billets, diront ceux qui voyagent en général et ceux qui connaissent Singapour en particulier. Mais par d’autres, Singapour, ils en rêvent et donc, on va penser à eux et faire comme si on découvrait.

Il fait chaud, mais pas trop, autour de 30°; il est temps de ranger les pulls jusqu’à Hong-Kong, tout au moins où le temps s’annonce bien plus frais. Humide, comme toujours ici. Mais supportable. Le problème est plutôt la climatisation, toujours à fond dès que l’on rentre quelque part, glaciale à vrai dire, plus encore qu’ailleurs en Asie, et les aller-retour permanents entre dedans et dehors : la situation idéale pour chopper la crève. Or, quand il faut goûter, mieux vaut éviter d’avoir le nez pris. En même temps, impossible d’avoir une petite laine. J’ai pas de solution.

Ou en étais je ? Ah oui, dans la voiture. J’ai toujours adoré l’autoroute qui mène vers le centre ville, bordée d’arbres immenses et majestueux. Je l’avais remarqué à mon premier voyage, il y a des années, et je l’aime toujours depuis. C’est tout moi, ça. Fidèle dans ses goûts. Tout est impeccable, jardiné, on roule bien. Faut dire que les taxes sur les voitures sont telles ici que ça décourage pas mal de monde de se mettre à l’automobile. Ou que ça privilégie les riches… Je vous laisse décider en fonction de votre sensibilité politique… On est en « démocratie autoritaire », à Singapour, il est bon de se le rappeler si on veut pas se faire éjecter ou prendre quelques coups de bâton, les châtiments corporels étant toujours en vogue. Si on aime pas l’ordre, mieux vaut pas trainer ici. Une règle d’or, AVANT d’exprimer son besoin de liberté individuelle, BIEN remarquer si elle empiète pas sur celle d’autrui. Un concept qui a du bon. Mais cessons là ce débat, pas de politique, pas de religion. sur ce blog Enfin, un peu, parce qu’aller en ce moment à Jakarta, première ville musulmane du monde vendre du vin, y’a que moi pour le faire, faut dire…

Hôtel Hilton, sur Orchard Road, belle adresse. Pas prévu de shopping, sinon, ce serait top, et de toute façon les marques de luxe sont les mêmes partout et ont colonisé la ville, comme elles l’ont fait dans toutes les capitales du monde. Boring. Accueil charmant, nous aurons ici un grand dîner mercredi et une master-class jeudi. Dans l’avion, rencontré un vieux briscard d’LPV et un client fidèle, déjà inscrit à l’un des évènements et qui me dit le plus grand bien de Stéphanie, jeune sommelière dynamique que tous ceux qui ont bu un coup à Singapour semblent désormais connaître. Il me tarde de la rencontrer. Le monde (et les avions) sont petits.

Dans l’ascenseur, on annonce l’event avec des photos du domaine.

Singapour-Day2-ascenceur

Toujours étonné de vivre ce genre de choses. Ah, le Clos des Fées, c’est toi ? Et tu es à Singapour ? Et il y a ta tronche sur la télé de l’ascenseur du Hiton ? Pourvu que tout cela ne soit pas un rêve et que je ne réveille jamais ! Si on m’avait dit ça, il y a quinze ans, quand on a fait le premier millésime de Clos des Fées avec des bouts de bois et des morceaux de ficelle, j’aurais doucement rigolé. Douche, rasage, blog, on repart deux heures après pour le premier diner. Vous pensiez que j’allais traîner ? Vous plaisantez j’espère.

Nous voilà au dernier étage d’un grand centre commercial, premier repas chinois du périple, avec une douzaine de membres de la « International Wine & Food Society ». C’est une sorte de confrérie, entre la chaine des rôtisseurs et le Lion’s Club, dont les anglo-saxons ont le secret. Nous, on sait pas bosser collectivement, et c’est notre problème numéro un, en tout cas dans le vin. Originaire d’Angleterre, elle a essaimé un peu partout dans le monde. A Singapour, elle compte une cinquantaine de personnes, si j’ai tout compris. Il y a en douze autour de la table. J’en connais déjà certains, qui sont venus à de précédents dîners, les années précédentes, merci à Nicola, sans « s », qui a organisé ça avec brio. De vrais amateurs. On regarde le menu, pure Chinese Food, essentiellement des fruits de mer et du poisson, beaucoup de fritures, des plats vapeur et un beau « Steamed Soon Hock Fisch with Soya Sauce poché » avec le Clos des Fées, j’ai un peu de doute… mais bon, c’est la vie.

Singapour-Day2-Menu

On commence à discuter, j’ai un peu peur pour mon anglais, que je ressors d’un tiroir, puis d’une boîte poussiéreuse, puis que je dérouille après avoir tenté de le remettre en route à coup de manivelle, bref, ça démarre poussivement et puis, au final, je baragouine sans complexe, sans certitude non plus sur certains mots que, le vin aidant, tout le monde a la politesse de faire semblant de comprendre. Il y a des clients sérieux, avec de sacrés caves, pas des perdreaux de l’année, et pas question de leur raconter des bobards ni de penser leur faire aimer de mauvais vins. Singapour est un marché « mature » comme on dit, la qualité des vins est un critère essentiel. Ah bon, c’est pas le cas partout. Non, c’est pas le cas partout…

On démarre avec du porc frit, puis des cuisses de grenouille sur un Clos des Fées blanc Sémillon top moumoute. Je vais pas vous faire des photos de tous les plats, ça vous donne faim et ça vous rend agressif, j’ai remarqué… Les vins sont conformes, ma hantise car ils sont arrivés peu avant et donc, c’est l’essentiel. Je les assumerai pleinement, ne pouvant me réfugier dans le déni en accusant le voyage, le gâteau, la warehouse ou le sommelier. Je déroule mon histoire à la Cendrillon, le terroir, si particulier,  si calcaire de Vingrau, puis ça dérive rapidement vers mes pensées bizarres sur le vin, la vie, la terre, le futur, le quotidien, la plante, on parle de tout et de rien, sauf de technique mais beaucoup d’émotion et de plaisir. Ca me va. Les deux blancs sont fort bons mais je crois que je l’ai déjà dit. Les Sorcières font merveille avec un gros morceau de homard with superior Broth (aucune idée de ce que c’est, faudra que je regarde le mot sur un dico car sur le coup, je suis trop absorbé). Les Vieilles Vignes dont parfaites pour peu qu’on rajoute dans la sauce du plat une râpée de piment oiseau qui arrache mais que c’est bon… Les Clos des Fées sont au top, soyeux et tactiles, un ouvert tôt, l’autre décanté minute et la sauce soya du poisson fait au final une liaison sympa, même si ce n’est pas un mariage inoubliable. Dernier verre autour de notre vin rouge muté à 50 grammes de résiduel, donc qui n’a pas droit à l’AOP Rivesaltes, que tout le monde s’arrache alors que bien sûr, c’est le seul que je ne vend pas… Dire qu’on ne sait pas quoi faire de nos Rivesaltes et que tout le monde ici commence à me sourire, voire à me caresser le bras pour en avoir… Nicola, charmante jeune femme, m’offre des fleurs pour décorer ma chambre. Un message ? Non, une tradition. Faut un début à tout, on m’avait très rarement offert des fleurs, à part un jour, quelques roses rouges, mais… je peux pas vous raconter, pas le temps, trop tard… Merci Nicola, pour tout !

On ne traine pas, ni au restau ni ailleurs, parce qu’il commence à faire sommeil avec ces fatigues subites et incontrôlables du jetlag. Mais faut trouver la voiture et vu qu’on a pas noté le niveau, on fait un peu les zombies du parking… Ca arrive… Aux meilleurs…

Réveil bien sûr en pleine nuit, comme il se doit. Ca passera. Du coup, j’écris…

 

Singapour-Day2-Fleurs

 

2 commentaires

  • Guillaume Gondinet
    22/01/2015 at 12:19 am

    (from zee wiki!)
    Superior broth (T: 上湯, S: 上汤): A dark tan broth made from Jinhua ham, pork, and chicken that has been slowly simmered to finish
    –> soupe de porc/poulet à infusion longue

    Bon courage pour la suite, c’est toujours aussi passionnant! Merci!

  • Monik des Berges
    22/01/2015 at 9:18 am

    J’apprécie toujours autant vos « carnets de voyages ». Merci. Continuez.

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