Vendanges 2019 * Jour J-1 * Mieux vaut deux jours trop tôt


Planter du Pinot Noir est sans doute une de mes plus douces folies. Mon Dieu, merci de me l’avoir un jour inspirée… Merci à ce Clos de Tart 2005, un soir de Grand Tasting, de m’avoir permis de «m’autoriser» la chose. Merci S. Merci M. Merci T. Merci la vie.

En fait, le monde est simple, jeune Padawan. Dans les vignerons, il y deux catégories. Ceux qui vinifient du Pinot Noir. Les autres.

Voilà. Les torchons. Les serviettes. Tu peux rire, tu peux te moquer, tu peux t’énerver. Mais c’est comme ça. Ou tu as du Pinot Noir, ou tu n’en as pas. Et moi, vois tu, j’en ai. Et du bon.

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Un grand coteau, avec des surfaces internes des argiles à faire pâlir certains producteurs de la Côte, plein nord, avec une lignée génétique que si c’était un Yearling, ça ferait un record à Deauville, cultivé niveau Grand Cru Bourguignon, ce qui veut dire niveau «Palace». Et si tu n’as jamais dormi dans un palace, soit gentil, tourne un peu ta langue dans ta bouche avant de faire un commentaire, simplement parce que tu ne sais pas alors tout à fait la différence entre certaines choses… A moins que tu n’aies des petits pois dans ton jardin. Et que tu les récoltes très tôt, alors qu’ils sont minuscules, au jour près, et que tu les cuisines à la perfection, niveau Alain Passard. Là, tu connais le petit pois. Et tu vois de quoi je parle. La différence entre ce petit pois là et les autres. Un autre légume. Mais est ce simplement encore un «légume» ? Alors, tu peux mourir, le sourire aux lèvres, tu auras vécu. Tu sauras…

Ma mère disait toujours que «Le mieux est l’ennemi du bien». C’est sûr. j’aurai dû l’écouter. C’est sûr aussi. Sauf dans le Pinot Noir. Là, le mieux, c’est quand tu as le mieux. Il n’y a pas de limite. On est dans l’art. Dans l’irrationnel le plus total. Le Pinot noir a quelque chose de Dalinien. C’est trans-cen-dan-tal… D’ailleurs, en lisant ce billet, tu vois bien qu’on y est, qu’on est passé dans la quatrième dimension, que, le Bizeul, ce matin, il chauffe dur, il devrait aller vite cueillir son pu…. de Pinot Noir. Et après, on sera tranquille, il «reprendra le cours normal de sa vie», comme à la fin des épisodes de la «4ème Dimension».

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Bon, le pinot «très fin», je l’avoue, j’en reviens un peu. Jeune élève d’école hôtelière, j’étudiais l’œnologie basique et le «cru des vins», la théorie d’un métier que je n’imaginais jamais faire un jour. Tout ça est un peu long, austère mais reste indispensable à l’amateur de vin comme le solfège l’est au musicien. Plus tard, en arpentant les vignes de Vosnes ou de Corton,  je me suis parfois demandé comment, à 10 000 pieds hectares, les grands crus bourguignons pouvaient être limités à 30 hl/h. Bon, maintenant, j’ai 10 000 pieds de pinot très fin et je ne dépasse jamais les 25 hl. Alors, je vous donne la réponse : dans le pinot noir dit «très fin», les grappes sont minuscules, que des grappes, il n’y a pas beaucoup, que les grains ressemblent à des myrtilles et qu’ainsi, le monde est parfait. Le vin déménage, il envoie du lourd, il s’exprime, vibre quelque chose de nouveau, enchante. Alors, qu’importe le rendement pourvu qu’on ait ? Qu’on ait quoi ? Le planage ? Ça se dit, le planage ? Maintenant, ça ce dit. «Et, mec, je le kiffe ton Pinot». Voilà, on y est. Faire un Pinot Noir à qui on peut dire qu’on le kiffe. Un truc actuel, moderne, d’aujourd’hui. Et emmerder les Cisterciens. Enfin. On en peut plus des Cisterciens… Qu’avant c’était avant. Et que le monde a changé.

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Bon, je sais, vous voulez savoir ce que j’ai bu à table ce midi pour commander la même chose, atteindre le même état… Doucement, ça commence à peine, on en est aux préliminaires, vous lisez pas les titres ?

Les vendanges, c’est demain.  Parce que les peaux sont douces, les anthocyanes extractibles, les pépins délicieusement parfumés, les pH parfaits. Que surtout j’ai envie, en vérité, que je sens que demain, c’est le jour J.

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Et puis n’oublions jamais, comme disait Henri Jayer (ou comme on lui fait dire posthumément, si tant est que le mot existe), «dans le pinot, mon gars, mieux vaut deux jours trop tôt que deux jours trop tard»…

Et si Henri l’a dit, alors…

P.S. : ne jamais oublier, quand on vinifie du Pinot Noir, d’introduire le nom, l’image, le souvenir (même si on l’a jamais vu ou bu…) le nom d’Henri Jayer dans la discussion. C’est la base !

7 commentaires

  • levavasseur
    30/08/2019 at 8:14 am

    Ah le pinot noir ! ! ! Un jour moi aussi j’aimerai en vinifier, mais d’abord je vais essayer deux ou trois pieds en sélection massale si le gars d’à côté veut bien que je lui en prenne deux ou trois brins !

  • Thierry
    30/08/2019 at 9:12 am

    Question bête : dans quelle(s) cuvée(s) du Clos des Fées retrouve-t-on du Pinot Noir du coup ? Je n’ai pas souvenir de l’avoir vu dans les cépages de vos cuvées que j’ai déjà bu 🙂

    • Hervé Bizeul
      30/08/2019 at 10:57 am

      La cuvée s’appelle « Aimer, Rêver, Prier, se Taire…» 😉

  • Marc
    30/08/2019 at 10:40 am

    Et mec, je le kiffe, ton post !!
    (as usual)

  • Carole
    30/08/2019 at 10:50 am

    L’amour de ce que l’on fait, l’enthousiasme, la passion, il n’y a que ça qui compte vraiment!!!

  • Eric
    30/08/2019 at 1:58 pm

    Billet écrit à coup de pinot noir ? J’ai bien ri et c’est vrai le pinot noir peut rendre fou

  • Éric marty
    31/08/2019 at 7:34 am

    Clos des fées ,clos de tart…. vaut mieux « tart » que jamais

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