Une mule sur un mur…


De retour du Clos des Fées où Franck et sa mule ont passé la nuit pour être prêts dès l’aube à labourer les vieilles vignes. Il a dormi sur le toit d’un Casot, sous la lune, juste dérangé par une troupe de sangliers à la recherche de fourmis, très nombreuses grâce aux semis de céréales de l’année dernière. Le Clos est magnifique, bruissant d’insectes, de fleurs, de chants d’oiseaux, d’odeurs de genêts qui commencent à fleurir. Les efforts commencent à porter leurs fruits. Pourtant, il y a encore tant à faire. La semaine dernière, l’équipe a passé quatre jours, à cinq, à sortir des cailloux de trois petites parcelles plantées dans la foulée. 115 bennes de cailloux… Des petits; des moyens; des gros; des champions du monde, gros comme une voiture, qu’il à fallu entamer à la barre à mine puis exploser à la dynamite. Tout cela pour planter 8, 9 et 10 ares en respectant les terrasses et les murets, trois parcelles que nous ne pourrons peut-être jamais mécaniser et qu’il faudra travailler à main. Sommes nous fous ou juste gravement malades ? :))

Cette balade matinale m’a rendu pensif. Toute la semaine, nous avons été 14 à travailler à la vigne et à la cave. 15 avec moi, 16 avec Claudine, qui, au bureau, résiste avec courage à l’invasion permanente de paperasses. Ébourgeonnage, taille de formation sur les plantiers, attachage des Syrah sur échalas, traitement « à la boîte », au soufre poudre, premiers traitements avec le pulvérisateur flambant neuf, installation des nouveaux groupes de froid : que d’énergie, que d’amour, que d’argent dépensés cette semaine. Que de fatigue aussi… Et pourtant Serge, le chef de culture, m’énumérait pas plus tard qu’hier soir tout ce qu’il faudrait encore faire pour que cela soit parfait. À nous deux, on fait un sacré duo de perfectionnistes…

Je pense à tous ces vignerons qui, comme nous, courent après l’excellence. Que recherchons nous ? Qu’est ce qui nous motive ? Pourquoi vouloir essayer de créer ce vin « mythique », celui qui alliera puissance, fraîcheur, finesse, sera bon aujourd’hui et sublime dans 20 ans ? Pourquoi nous sentons si responsables d’un petit bout de terre où nous refaisons les murets, recréons la biodiversité, remettons en route les écosystèmes ? Par passion du vin, tout simplement. Et dans l’espoir qu’à l’ouverture de la bouteille, un peu de cette passion coule dans le verre et inspire celui qui le boit.

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