Professeur à normale-sup…


C’est ma mère qui aurait été fière de moi, la semaine dernière ! Elle qui ne rêvait pour son fils que de longues études et d’un métier bourgeois, sa déception fut immense lorsque, à 15 ans à peine, je décidai de quitter l’école. Même si, plus tard, je repris un cycle scolaire, je crains d’avoir brisé la plupart de ses illusions sur ma future carrière et mon hypothétique bonheur qui ne pouvait, selon elle, n’être que celui d’un haut fonctionnaire, d’un magistrat du siège ou d’un notaire.

Bon, elle est décédée, il y a longtemps, mais j’ai plaisir à penser que, s’il y a une vie quelconque après la mort, d’où qu’elle me regarde, elle aurait été fière de me voir, mercredi dernier, rentrer, tout pimpant mais un peu ému, rue d’Ulm pour… donner un cours à normale-sup. Ou plutôt, vous l’avez compris, mener à bien une dégustation de Clos des Fées pour le wine-club de l’école… Mais pour mon Ego, c’est mieux « donner un cours » :))

Bon, devant tous ces jeunes gens fort motivés, j’avoue que je n’en menais pas large. Je sais bien aujourd’hui qu’il y plusieurs sortes « d’intelligences », toutes fort différentes, fort complémentaires et que, sans doute, ce sont les formes les plus exotiques et les moins considérées de ladite intelligence qui sont parfois les plus utiles – ou les plus inutiles mais les plus belles. Comme moi, vous avez dû vous rendre compte, au fil du temps, que bien des chercheurs ou des théoriciens brillants sont incapables de faire une quiche lorraine ou que bien peu de professeurs émérites arriveraient à diriger une entreprise, même des plus modestes. Il n’empêche que je suis toujours très admiratif et, je le crains, toujours un peu complexé, devant ces sortes d’hommes et de femmes qui comprennent en un instant ce que des années d’études n’ont jamais réussi à faire rentrer dans mon cerveau, avouons le, limité.

Malgré tous mes efforts et la lecture régulière de « Science & Vie » (ma femme me fait gentiment la remarque que, peut-être, je devrais commencer par la version « junior » :)), je patauge par exemple toujours autant dans mes tentatives de compréhension de la physique quantique, alors que mon instinct me dit que, peut-être, il y a là des explications à tout ce que je ne comprends pas dans la fabrication du vin.

Il faut que je vous dise aussi qu’en regardant, pour m’amuser, le site internet de l’école, j’avais constaté que même les programmes m’étaient, comment dire, pour le moins « exotiques ». De plus, en voyant le devenir et les travaux de certains anciens élèves, très occupés à découvrir les secrets de l’univers ou à mettre au point la fission de l’hydrogène, j’avoue que j’avais trouvé de quoi aisément alimenter mon angoisse… Ah, j’oubliais de vous dire que ces jeunes gens sont fort gâtés. Leur mérite, leur passion, la renommée de l’école, aussi, bien sûr, tout cela fait que les plus grands domaines viticoles et autres grands crus classés ont, ou vont faire, une dégustation chez eux.

Enfin, comme dit mon voisin Charlou, « la plus belle fille du monde ne pouvant donner que ce qu’elle a », nous y allâmes de bons cœur et tout se passa, je crois, plutôt bien. Par chance, les vins se goûtaient bien, ce soir-là. Le débat fut animé et, pour certains, je l’espère, l’émotion au rendez-vous. Ne manquaient que mes questions sur la physique quantique, mais, c’est ma faute, nous avons dû partir comme des voleurs, un dîner convenu de longue date nous attendait.

Bon, comme ça, un jour, peut-être, je retournerai rue d’Ulm, dans l’amphi de physique, cette fois. Et là, Maman, même si mes questions sont un peu simplistes, tu seras vraiment fière de moi… :))

P.S. : ne me demandez pas pourquoi j’ai pris la quiche Lorraine comme exemple, je n’en ai aucune idée. Quand à ce qu’est un « muon », alors là… Mais le dessin, je veux dire l’équation, est vraiment jolie. En plus, le nom, si on le répète plusieurs fois, « muon, muon, muon », c’est tordant, non ? :))

P.P.S. Ca ressemble un peu au cri du paon, non ? :))

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