Mon ami le Chenin


On a beau chercher les meilleurs fournisseurs, payer sans discuter, il faut se résoudre à l’avouer : certains de mes fournisseurs sont des branquignols.

Bon, je ne généralise pas, parce que vraiment certains sont au top (Eric, si vous me lisez, ce message n’est pas pour vous, bien au contraire ;-)) mais pour les autres, il y a vraiment des baffes qui se perdent. C’est un transporteur qui devait livrer depuis lundi de la semaine dernière et qui prend une petite semaine de retard « parce qu’il pensait que c’était pas urgent ». C’est une messagerie express, un de ces transports qui vous coûte une fortune en vous parlant de performance et qui vous annonce avec un grand sourire qu’un carton d’étiquettes s’est perdu mais que « peut-être mais c’est pas sûr, on va le retrouver »… Bon, je suis d’une humeur de dogue, c’est normal, ce sont les mises en bouteilles. Enfin, ce qu’il y a de bien, c’est qu’au moins, il ne pleut pas à torrent ou qu’il ne neige pas, comme l’année dernière.

Bon, le blog, ca défoule. En attendant que la boucheuse soit désinfectée, histoire de ne pas vous gâcher votre journée, j’avais mis en réserve un petit texte qui peut-être, vous intéressera. Enfin, c’est pas sûr, mais après tout, vous n’êtes pas obligé de le lire. Je vous avais promis de continuer un de ces jours ma série « encyclopédique » sur les cépages. Histoire de prouver que je ne m’intéresse pas qu’aux cépages du midi et pour me consoler de n’avoir pu monter au Salon des Vins de Loire, j’avais compilé un petit texte de tout ce que j’ai lu, de tout ce que je sais et de tout ce que je pense du Chenin, un cépage que j’affectionne. Le voilà. Allez, courage, j’y retourne…

Histoire

Le Chenin est sans aucun doute d’origine Angevine. On le connaît avec certitude en Anjou dès l’an 845 grâce à des documents d’époque qui portent le sceau de Charles le Chauve. Il passe ensuite sans doute en Touraine sous le nom de «Plan d’Anjou» grâce à Thomas Gohier, seigneur de Chenonceau qui souhaite planter une vigne autour du magnifique château qu’il vient d’acquérir. Au milieu de plusieurs cépages en provenance de nombreuses régions de France, seul le Chenin s’adapte et voit sans doute son nom dérivé de celui du château, dont le vin est désormais réputé et dont Henri II raffole. L’histoire est belle. Mais est-elle vraie ? Certains auteurs pensent, de leur côté, qu’il tient son nom de celui du monastère du Mont-Chenin où son beau-frère, Denis Briçonnet, abbé de Cormery, se retira pour cultiver tranquillement la vigne qu’il avait plantée. Son essor au XVe siècle, en Touraine et en Anjou, Rabelais en parle abondamment dans Gargantua, peouve que le Chenin est déjà à l’époque le grand cépage de la Loire. Son succès ne faiblira plus mais les surfaces cultivées varieront ensuite en fonction des aléas et de la demande en vins moelleux et liquoreux.

Principaux Synonymes

Pineau de la Loire, Gros Pineau de Vouvray, Pineau de Savenière, Plan du clair de lune, Pineau d’Anjou, Blanc d’Anjou, Steen (en Afrique du Sud).

Petite histoire

Le Chenin blanc serait pour certains ampélographes une mutation naturelle du Chenin Noir, plus connu sous le nom de Pineau d’Aunis. Mais on doute aujourd’hui fortement de cette parenté. On sait aujourd’hui,, grâce aux avancées de la génétique, qu’il est un descendant d’un semis de Savagnin, cépage du Jura qui est à l’origine de plusieurs cépages actuels.

Zone de culture actuelle

Le Chenin évoque inévitablement dans l’esprit des connaisseurs du monde entier les grands vignobles de la Vallée de la Loire. Seul, il est à la base de toutes les grandes AOC de l’Anjou (Coteaux du Layon, Bonnezeaux, Quarts-de-Chaume, Savennières, Coulée de Serrant et Roche aux Moines) mais il peut aussi être associé à d’autres cépages, le Chardonnay et le Sauvignon en particulier, pour donner les vins d’AOC Anjou. On le retrouve aussi en Saumurois où il donne quelques-uns des meilleurs vins effervescents de France et bien sûr en Touraine (Vouvray, Montlouis, Coteaux du Loir, Jasnières). Classé depuis peu « cépage recommandé » dans le Sud-Ouest et dans le Languedoc, il participe à l’élaboration de l’AOC Blanquette de Limoux. Dans le reste du monde, c’est avec 30 % du vignoble l’un des cépages le plus cultivé en Afrique du Sud tandis qu’il est bien représenté en Californie, en Australie et en Nouvelle-Zélande. Sous ces climats résolument méditerranéens, le Chenin n’atteint cependant jamais la finesse, la fraîcheur et la minéralité des grands vins de Loire.

Évolution des surfaces cultivées en France (en ha)

1958 – 16 594

1968 – 14 199

1979 – 9 552

1988 – 9 054

2001 – 9 300 (estimation)


Les vins

Les vins de Chenin ont ceci d’extraordinaire qu’ils peuvent être secs, demi-secs, moelleux, liquoreux ou pétillants. Si l’on rajoute à cela les différences engendrées par les terroirs, les climats et les vignerons qui les ont influencés, la gamme de vins disponibles semble presque infinie. Ce qui fait la liaison entre tous reste sans doute ce délicieux goût fruité (pomme verte, acacia, pamplemousse, citronnelle, chèvrefeuille, foin coupé, tilleul, verveine), qui tire parfois vers l’exotique (ananas victoria, mangue, citron vert, fruit de la passion). En bouche, on ressent souvent des arômes et des goûts de raisins mûrs ou surmûris (orange et citron confits, miel, aubépine, pêche, camomille, jasmin, citron confit, mirabelle, abricot, pêche au sirop, pâte de coing) tandis que les plus grands crus, au vieillissement, prennent des couleurs vieil or et présentent des arômes toujours plus complexes plus envoûtants (réglisse, cumin, pain d’épice, encens, guimauve fraîche, noisette, girofle, canelle)… Peu de cépages et peu de vins sont capables de provoquer tant de sensations … et de qualificatifs. Vins de garde, distingués et virils, les vins de Chenin possèdent à la fois une exceptionnelle rondeur et une immense fraîcheur, un support acide qui les rend élégants, nets, frais et joyeux. Ils se prêtent volontiers au passerillage et sont de parfaits candidats à la pourriture noble. Ce sont alors de grands vins liquoreux, parmi les plus riches de France et ils peuvent alors vieillir parfois plus d’un siècle dans l’obscurité d’une profonde cave creusée dans le Tuffeau. Ils prennent alors d’incroyables couleurs d’or liquide et d’ambre marine.

Mets et Vins

Sur les grands vins de Chenin vinifiés en sec, on peut sans aucun risque déguster une quiche Loraine, un brochet beurre blanc, un soufflé au fromage, quelques écrevisses à la nage, des langoustines rôties, un merlan frit ou un saumon grillé à l’unilatérale. Les vins demi-sec possèdent un réel talent à se marier à la cuisine exotique. Ils tolèrent le piment et adorent les épices au point qu’ils semblent être nés pour se marier avec la sensualité naturelle des cuisines Indienne et Thaïe. Ils se marient aussi divinement avec les desserts de « grand-mère », pain perdu, gâteau de riz, tartes Tatin, cakes aux fruits confits ou crêpes à la confiture, sans oublier les soufflés à l’orange ou les desserts aux fruits de la passion. Quant aux grands Chenin liquoreux , ils sont particulièrement à leur aise avec le foie gras, les volailles rôties, les poissons accompagnés d’oseille ou de poireaux, les fromages à pâtes persillées (la fourme d’Ambert en particulier), les desserts aux poires, aux pêches, aux abricots, aux amandes et bien sûr avec la glace à la vanille.

Principales caractéristiques culturales

Vigoureux, de débourrement précoce, le chemin reste exposé aux premières gelées de printemps, dramatiques pour le vigneron car ses bourgeons secondaire sont peu ou pas fertiles. Lorsqu’on s’intéresse vraiment à lui en profondeur, on se rend compte que les variétés abondent, tant au niveau des différences apparentes que des caractéristiques culturales. Selon les individus, la maturité peut en effet varier de plus de 3 semaines et, même s’il est toujours tardif, sa cueillette s’étale du 1er octobre au 15 novembre. Selon les terroirs, les vignerons ont d’ailleurs toujours cherché à adapter les populations aux potentialités de leurs crus, il peut produire du simple au triple. Le potentiel acide est toujours important. Le Chenin est particulièrement sensible à la pourriture grise, à l’oïdium, à l’Eudémys et à la plupart des maladies du bois. Selon les conditions climatiques, il était autrefois extrêmement sensible à la coulure, mais les nouveaux clones semblent avoir grandement diminué ce défaut historique.


Description

Souche vigoureuse, tronc important, écorce adhérente se détachant en minces lanières en vieillissant. Bourgeonnement duveteux, blanc nuancé de vert clair. Jeunes feuilles duvetées, tâchées de bronze, limbe inférieur cotonneux. À maturité, feuilles de grande, tourmentées en forme d’entonnoir, parfois trilobées ou à peine lobées sur le même rameau, sinus pétiolaire peu ouvert, dents irrégulières, moyennes, à côtés convexes, nervures fortement pigmentées de rouge sur la plupart des clones, face inférieure présentant une faible densité de poils couchés. Sarments semi-érigés, mérithalles moyens à longs, entre-nœuds peu saillants, longues stries longitudinales, légèrement velues, souvent carminées à la base ou du côté exposé au soleil, vrilles longues, nuancées de rouge. Grappes dressées, souvent assez grosses, coniques, régulières, avec un aileron bien développé ou deux petits, baies petites à moyennes, ellipsoïdes, régulières, croquantes, dorées, sucrées, charnues et parfumées à maturité.

Cépage dit de deuxième époque, le Chenin est réputé débourrer 1 à 2 jours avant le Chasselas et mûrir trois, voire quatre semaines après lui.

Clones

Il y a deux ans, 8 clones étaient agréés par l’ENTAV/INRA. Ils portent les numéros : 220, 278, 416, 417, 624, 880, 982 et 1018. Trois d’entre eux sont classés C (fertilité et poids des grappes supérieur), cinq sont classés B (fertilité et poids des grappes moyen). Sachant que, selon le clone, le rendement variera de 30 à 100 hectolitres à l’hectare, on se rend compte que le choix est donc restreint pour les vignerons à la recherche de qualité.

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