Le Goût Juste – Episode 2


Bon, commençons, si vous le voulez bien. Comme la plupart d’entre vous le savent, il est couramment admis qu’il existe quatre saveurs de base : sucré; acide; salé; amer.

Je ne suis pas chercheur au CNRS et je ne débattrai donc pas, sous peine d’être ridicule, sur la vérité ou l’erreur d’une telle affirmation. « L’homme sage connait ses limites », disait non pas ma grand-mère, mais Charles Bronson dans les « Sept Mercenaires » ;-).

Ce truc des saveurs, on me l’a appris comme cela, il y a bien des années, dans une formation sur le vin, à l’école hôtelière. Je répète donc ce que l’on m’a appris (comme le font tant et tant de sommeliers au moment de choisir un vin sur un plat…). Mais j’y ajoute pour ma part la notion de « pimenté », que ma femme m’a fait découvrir, en bonne réunionnaise qui ne concoit pas un bon repas sans une touche de piment ;). Et celle « d’ardence », ça c’est l’huile d’olive qui me la fait ressentir, plus violemment depuis que je suis producteur. Elle est difficile à expliquer, mais facile à ressentir lorsqu’on a trempé les lèvres dans des huiles d’olives à peine sorties du pressoir.

Pour moi, même si ces deux « saveurs » n’en sont pas vraiment sur le plan « physiologique », je m’en voudrais de les passer sous silence. Depuis une vingtaine d’année, les « savants » du goût y ajoutent une cinquième, l’unami, qui correspond à celle du monoglutate de sodium, très (trop ?) présent dans la cuisine chinoise bas de gamme, soit l’essentiel de ce qu’on trouve en Europe. Mais bon, là, je l’avoue, j’ai jamais vraiment compris quel « goût » cela avait, peut-être parce que mon organisme n’aime pas trop ça, si vous voyez ce que je veux dire. Et puis y en a pas dans la plupart des bonnes choses qui font mon quotidien de bon franchouillard gastronome, du jambon beurre à la blanquette, alors donc, l’unami ne me passionne pas. Désolé ;-) En tout cas pas pour l’instant. Quand les Chinois domineront le monde, on verra bien, et mes petits enfants mettront à jour ce billet ;-). Comme a dit je sais plus qui « les Chinois vont nous botter le cul. Le problème est qu’ils ont beaucoup de pieds, et nous pas beaucoup de culs » ;-)). Si je continue à digresser de la sorte, on n’est pas sorti de l’auberge ;-)

Bon, en général, les tenants de la théorie des quatre saveurs s’empressent donc de vous apprendre, tout de suite après, que les « récepteurs » de goût, spécialisés, qui font la différence entre ces quatre saveurs, sont disposés à des endroits différents de la langue :

– le sucré sur le bout de la langue
– l’acidité sur les côtés de la langue
– le salé, un peu plus au centre,
– l’amer au fond de la langue

J’ai jamais essayé non plus de m’injecter délicatement à la seringue des saveurs sur différents endroits de la langue. De plus, comme je suis d’une normalité affligeante, je suis dans l’incapacité de faire du contorsionniste de langue. Mais j’ai tendance à croire ce genre de truc, sans vraiment comprendre, au final, ce que ce genre de truc a de vraiment important ;-). Jusqu’au jour où un savant dira le contraire. Ça nous empêchera pas de nous lécher les babines… ;-)

Ce qu’il y a de très important, en revanche, c’est de comprendre que nous avons tous des « seuils » de perception de ces différentes saveurs qui sont très, mais vraiment TRÈS, personnels.

Ah, cette séance inoubliable, au laboratoire du bon Jacques Puisais, où tous les membres du Goût Juste, à l’époque, étaient venus se faire « étalonner » pour savoir nos seuils sucrés, salés, acides ou amer.

On avait fini par un barbecue géant, le soir, sur le thème de « l »oreille de cochon grillée », le bon Jacques tenant à nous convaincre de la grandeur du « gluant » et du « cartilagineux ». Un moment inoubliable ;-). Suis pas prêt de commander un jour une « sortie d’Opéra », comme on l’appellait à la belle époque.

Pour résumer, sur une échelle de 1 à 10, je peux être à 2 et donc très peu sensible au sucre (je sens de 20 g/l en 20 g/l, ce qui est énorme…). Si je suis à 9, je vais détecter des différences de 2 g/l en 2 g/l. Ce qui est exceptionnel. Globalement, cela dépend à la base d’éléments génétiques, influencés par l’éducation, bien sûr, puis par l’expérience, évidement, sans oublier l’alimentation quotidienne. Si on bouffe tout le temps du sucre, on devient de moins en moins sensible à celui ci, et il en faut de plus en plus pour détecter la saveur. Autre exemple, l’amertume est totalement (ou presque) sortie de nos « vies alimentaires », alors, la plupart d’entre nous y est hypersensible… Mais si vous vivez dans le Nord et si vous continuez à boire de la chicorée le matin (ou que vous êtes réunionnais(e) et que vous mangez des margozes, note de Claudine ;-), là, vous ne serez pas dérangé par l’amertume dans un plat, ou, au contraire, vous la savourerez merveilleusement.

Ah, apprendre à savourer l’amertume des choses… Voire de la vie… Voici encore une chose que m’a apporté le Goût Juste. Oui, oui, il existe une « philosophie de cuisine » et je suis  fier d’avoir été à une telle école ;-)

Une autre chose importante pour le moral à savoir, c’est que ces cellules qui servent au goût, comme celle de l’odorat, sont parmi les seules à se renouveler jusqu’au dernier jour ne notre vie… Ah, que c’est donc rassurant de savoir qu’en des plaisirs de la vie ne nous sera retiré qu’avec elle ;-). Ceux qui ont des lettres et qui ont lu « au delà de cette limite, votre ticket n’est plus valable », du regretté Romain Gary, me comprendront. ;-)

Mon dieu, que de choses à dire, et nous n’en sommes qu’à l’épisode 2… Pire que Starwars ;-)). Résumé de la journée : c’est pas parce qu’on goûte le même plat qu’on ressent la même chose ;-)

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