Vendanges 2020 – Prendre soin de soi


Garder les idées claires. S’occuper de son corps. S’alimenter d’une manière équilibrée. S’hydrater. Se protéger du soleil pendant qu’on coupe. Mettre un chapeau. De la crème 50. Hum…

Vœux pieux pendant les vendanges. Mais le dimanche, peut-être, tenter de prendre soin de soi, tant qu’il est encore temps ? Dormir, enfin, une nuit complète, 7 à 8 heures comme le conseillent les spécialistes ? Dans l’obscurité complète ? Impossible quand tant de choses vous tournent dans la tête…

Je l’aime, ce dernier week-end avant l’apocalypse, pourtant. Alors, cette année, j’ai décidé de me faire du bien. Bon, un long moment en cave, bien sûr, où les petits vins bouillonnent gentiment. Les vignes, car il va bien falloir commencer un jour. Y aller. On a fait les préliminaires, il reste deux ou trois effeuillages, sans doute. Pas plus. Il convient donc de rentrer. Dans le vif du sujet. Dans les souches. Dans les grands terroirs. Dans les vendanges, les vraies. Oui, mais quand ? Là est la question. Toute la question. Ni trop tôt, ni trop tard. Just in time, si vous me permettez de rêver.

L’automne tape à la porte, l’air change, le soleil perd de son arrogance, s’adoucit. La lune, aussi, bien sûr. Elle descend, rapidement, et du coup, à l’évidence, la vigne comprend qu’il faut conclure. Son feuillage se parchemine, les premières feuilles, désormais inutiles, s’envolent sous une tramontane douce et sucrée. Ouh ! il est tard, on sent la fatigue et le roman populaire… Je vous ai dit que pendant l’été, j’ai décidé de lire tout Guillaume Musso ? Bon, je devais faire Chateaubriand, et puis j’ai choisi la facilité. Guillaume, le meilleur, le suc, c’est les citations en début de chapitre. Elles sont top. Il doit avoir une sacrée équipe qui les lui sélectionne… Il se lance aussi parfois dans de beaux aphorismes, que je pourrais lui piquer. Ma Syrah, cette année ? «Une beauté des années 90, sensuelle, rayonnante»… Pas mal…

Quand à lune… La lune, les amis… En rentrant de Calce et en allant déjeuner sur la plage (certaines plages font ce week-end leur «closing» et je voulais manger un dernier riz au Zaza, une institution locale), j’ai vu que l’installation des poètes continuait. La lune, c’est leur dieu. Bio, biodynamie, c’est mots sont comme un miel sirupeux et toxique qui dicte leurs décisions. Il faut voir l’état d’abandon et de désespoir de beaucoup de vignes… Toujours actif, le concept de «vignes jetables» semble désormais complété par le concept de «biodynamie passive», une fierté pour la «non culture». L’agro-viticulture progresse et on laisse désormais pousser les arbres dans les vignes, la nature l’envahir. Faut voir le résultat… Des vignes mourantes, des raisins attaqués par le mildiou, l’oïdium, les vers de la grappe, le cryptobable (la pyrale de l’oranger, le nouvel ennemi qui ravage tout dans la plaine et monte doucement vers les coteaux, parce personne ne fait rien). Incroyable combien la croyance est désormais plus écoutée que la science. Ainsi va le monde. La bio, la bioD, c’est plus d’intelligence, plus d’attention, plus de temps, plus de matériel, plus de mains, plus de temps, plus d’argent. Ce n’est pas laisser faire. Je m’arrête chez mes amis les Gauby. Lionel termine doucement, sans se presser. On se torche une Muntada 2018 d’anthologie. On évoque ce désastre, inutile d’en rajouter. On n’est pas dans Ratatouille où «tout le monde peut cuisiner». Non, décidément, «tout le monde ne peut pas faire du vin»… Tiens, grâce à Musso, j’avais mis de côté pour la bonne bouche cette citation d’Hemingway : «Un homme intelligent est parfois obligé de boire pour pouvoir passer du temps parmi les imbéciles». Tiens, là, un truc me gargouille et je sens que je vais encore me faire des amis…

Un peu de soleil et surtout l’énergie de la mer m’ont fait un bien fou. Avoir les idées claires, c’est la chose primordiale que je dois avoir cette semaine. Bon, ça a cicatrisé aussi mes plaies, parce que je me suis vautré sérieusement en ratant le saut d’une clôture électrique. Détails.

En arrivant devant la plage, je recule de quelques pas et fais cette photo.

La plage naturiste est bien délimitée. Pour le vin, c’est plus… vague. Me voilà à faire du sans soufre, grappes entières, dans un but précis. Sur France 5, le dimanche soir, une émission fait l’apologie du vin nature, expliquant fort sérieusement que la biodynamie est une méthode scientifique qui permet de se passer de soufre. Hum. La magie existe donc vraiment. Les étoiles nous gouvernent, comme dans ce merveilleux livre de Pierre Boulle, si pertinent en 2020, les jeux de l’esprit : l’horoscope, c’est la vérité. Ah au fait, parait qu’on va tous s’y mettre, au vin nature. On doit pas voir les mêmes vignes…

Au niveau horoscope, je me contente, pour ma part, de celui de Bob, dans Courier International, qui, chaque mois, me réjouit et m’enchante. Il me prédit d’ailleurs pour septembre de «ne pas relâcher mon attention». Merci, compte sur moi, Bob. Je t’aime.

Le riz est délicieux, les amis joyeux et d’une causticité brillante, on boit un excellent vin nature qui n’a pas besoin d’évoquer la magie pour être justifié de son existence. La mer me régénère. A lovely Day… Bill Withers est mort en mars de cette année. Personne ne l’a su. RIP, l’ami. Tu restes avec moi, et pas que pour cette chanson. Respect, humilité.

Ce que j’écoute, au jour le jour, pendant les vendanges. Mais peut-être pas tous les jours. Vous écoutez, au moins 😉 ?

2 commentaires

  • Nicolas de Rouyn
    07/09/2020 at 9:27 am

    Bel envoi

  • Pascal
    14/09/2020 at 7:18 am

    Dans votre liste musicale, vous pourriez mettre aussi Tonton Crystobabe est arrivé.
    Et comme ils disent dans la zone naturiste : c’est qui ce BOB ?

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