Vendanges 2022 – Jour 11 – Vivre (normalement)

Pour la première fois cette année, nous n’avons pas vendangé le samedi. Tant dans la cave du Clos des Fées que dans celle des Sorcières et de Modeste, la matinée de samedi a été bien occupée mais, du coup, c’est un vrai week-end qui nous attend. Peu de vins sont en cuve à ce stade, les Pinot sont décuvés et Malo enclenchées, les blancs fermentent ou débourbent, incroyable mais… repos. J’avoue, ça fait bizarre d’avoir un jour off après la semaine de fou que nous venons de vivre.

Tenter de reprendre une vie «normale», un rythme «humain» s’avère compliqué pour moi. Réveil un peu avant 6 h, je suis formaté, ça y est. Je traine, devant mon café, un peu comme un animal étonné dont on a changé son environnement. Coups de fil d’amis, les infos sur l’iPhone, fin de l’abondance ou pas, allez, faut se bouger.

Une vie normale ? Et si je feuilletais un des nombreux catalogues qu’on a déversés toute la semaine dans ma boîte aux lettres ? Tiens, le leerdammer (l’original, hein, ne nous trompons pas…) est en promotion, ça va réjouir l’ami Dominique Bouchait, mon fromager de cœur. La lessive est en promo, je passerai en prenant de l’essence à Intermarché.

Ma voiture ressemble à une poubelle, un petit coup d’aspirateur lui fait du bien. Plage ? Oui, plage, allez. C’est aussi un des charmes de ce vignoble, la mer est à deux pas. Leucate, quelques heures au soleil, quelques huîtres en passant et trois beaux rougets, ceux de septembre, les fameux «vendangeurs», gras à souhait en cette saison.

Tiens, une brocante vide-grenier à Leucate. Vie normale, c’est un ordre. Je flâne, un livre bizarre étrange sur les «forces cosmiques» et l’influence sur les êtres humains attire mon attention, mais bon 10 euros… Je m’en veux de ne pas l’avoir pris, il y avait une formidable citation de Bouddha en exergue, sur le fait de n’obéir à aucune coutume, de n’appliquer que ce que l’on comprend, ce que l’on ressent profondément soi même. Ma vision du vin. Bouddha et moi, en phase ? Je souris…

Un autre mérite une photo…

Je le feuillette, amusé des méthodes proposées. Si je choisissais ma réincarnation ? Vigneron, bien sûr, et en Roussillon, nulle part ailleurs dans le monde. L’impression d’être à ma place, au bon endroit, au bon moment.

Je traine, je lis, je tente de couper, de faire du vide pour faire renaître l’envie, le désir, lundi, de recommencer, pied au plancher. Le soleil est un peu moins fort et la pluie lointaine, il faudra en tenir compte. Rien ne presse, mais le soleil est puissant et il ne faudra pas attendre pour finir les blancs. Nouvelle lune depuis hier. Les choses vont elles changer ? Mystère…

Abonné au blog «les cinq du vin», Michel Smith me fait l’honneur d’un billet d’une vérité et d’une gentillesse qui me touche en plein cœur. Trop gentil… Il a tout compris, en seigneur qu’il est. Des journalistes du vin comme ça, on en verra plus. Merci, Michel.

Dans mon flow, Deezer me propose une chanson que je n’ai pas écoutée depuis des lustres. «J’ai tant rêvé»… Henri Salvador l’a écrite, comme pas mal d’autres avec Michel Modo, un des inoubliables «gendarmes de Saint-Tropez»… J’aurais bien aimé voir ça…

Tiens, pour mon grand départ, ça serait pas mal quand le cercueil avancera vers son bûcher… Fatigué, à vif, bien sûr encore en lien avec mes cuves et mes vignes, je suis à «ça» de pleurer. C’est les vendanges.

Ce que j’écoute, au jour le jour, pendant les vendanges. Mais pas tous les jours.

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