Changement de rythme


Retour hier du « Grand Tasting », anciennement connu sous le nom de « Salon des Grands Vins », au Carrousel du Louvre, Paris, France. Ce matin, j’étais, je l’avoue sans honte, épuisé, comme sortant d’une machine à laver. Enfin, pas physiquement, bien que piétiner pendant 10 heures sur place n’améliore pas l’affaissement de mes disques intervertébraux. Non, plutôt vidé, sans aucun influx nerveux, obligé de ne rien faire pendant quelques heures, même écrire, ce que je me remets doucement à faire, en ce début d’après midi, alors que je reprends sans impatience mes biorythmes campagnards. Après la foule, la solitude. Après la ville, la terre battue des chemins. A nous le plaisir de retrouver un rythme de vie plus naturel, proche de celui du soleil. Mais c’était vraiment formidable, alors, aucun regret.

Il y aurait tant de choses intéressantes à dire sur ce salon, en discutant, après coup, entre amis autour d’une table. Mais à écrire, ce serait trop long et trop complexe. Quelques réflexions, néanmoins, me viennent à l’esprit. Bien sûr, alors, je vous les livre.

C’est un salon unique, sans aucun doute, que nous avons été contents de faire et qui, je l’espère perdurera. Pour l’amateur, c’est une occasion incroyable de déguster sur un pied d’égalité (ce qui n’est pas courant), quelques uns des « meilleurs » et des « plus prestigieux » vins de France et d’ailleurs. Il est alors salutaire de se rendre compte combien parfois l’accolade de ces deux adjectifs qualificatifs est méritée et combien aussi, trop souvent, elle est exagérée, voire mensongère. Il faut certes payer 30 euros, à moins d’être, bien sûr, invité (il est bon alors de savoir que l’exposant paye – cher, les invitations qu’il distribue à ses clients…) Mais c’est le prix de la liberté pour l’amateur véritable, la possibilité pour lui de goûter pour plusieurs centaines d’euros de vin en quelques heures et de se faire son propre avis sur des vins qu’il est difficile de s’offrir, le tout sans être influencé, ni par le lieu, ni par le prix.

De mémoire, je n’ai pas souvenir d’un salon où l’on puisse par exemple s’offrir une coupette de Dom Pérignon, suivi d’un Bollinger 99 (sublime…), d’un Roederer, d’un Jacquesson (magistral), d’un Egly-Ourié (si pur, tendu à l’extrême) et de bien d’autres, pour ne citer que les Champagnes. Pour les vins rouges, le choix est encore plus incroyable et il y avait de quoi vraiment se faire plaisir, découvrir, se rassurer sur les grandes étiquettes ou s’émouvoir sur des vignerons « émergeants » comme le Clos des Fées… Et oui, les amis, ne nous leurrons pas : bien qu’ayant eu un monde fou pendant ces deux jours, il était amusant de voir combien certains visiteurs ne venaient que pour certaines étiquettes archi-connues et snobaient les autres, les inconnus, les sans-grades. Tant Pis. Pour eux ;-))

Mais il était tout aussi intéressant de voir combien le bouche à oreille fonctionnait entre amateurs ouverts (et entre exposants… ;-)) et comment, d’heure en heure, la fréquentation de certains stands augmentait alors que celle de beaucoup d’autres, pourtant bien plus réputés, s’amenuisait. La roue tourne, lentement, mais elle tourne quand même en direction de la vraie qualité et de l’émotion sincère, et c’est encourageant. Parce qu’attention, sur un salon comme celui ci, la compétition est drôlement rude : à notre gauche, l’ami Jérôme Bressy avec des 2004 d’anthologie ; à notre droite, le redoutable Domaine de la Mordorée, pas peu fier de ses incroyables cuvées « Reines des Bois » et autre « Plume du Peintre », franchement inoubliable. En face, Pibarnon, force tranquille du Mourvèdre, au stand littéralement pris d’assaut, aux vins « références ». Á « 3 heures », Alain Brumont, en personne, montre qu’il n’a rien perdu de son énergie et de son incroyable talent en servant un 2002 qui laisse sans voix, la fameuse cuvée La Tyre. Pour aller dans ce genre de salon, le vigneron doit vraiment être sur de la qualité et de la personnalité de son vin, parce que là, toute faiblesse ou toute exagération saute aux yeux…

Vendredi, à l’ouverture du salon, en me dirigeant vers mon stand, une angoisse, justement, m’a saisi : comment allaient se goûter les vins du Clos des Fées ? Moi qui suis si fier d’avoir des vins « vivants », changeants, parfois fantasques, j’ai souhaité intérieurement très fort qu’ils se présentent ce jour là à leur avantage. Et bien j’ai été, je pense, exaucé. Je ne sais pas si c’est le Louvre, les vibrations de ce lieu chargé d’histoire, l’énergie de ces millions de personnes qui passent par là chaque année, le climat, les basses pressions ou les forces cosmiques, mais ce jour-là, les 2004 se sont montrés particulièrement enjoués et charmeurs. Sauf le vieilles vignes, peut-être, qui, à un moment, s’est mis à présenter une petite réduction, ce qu’il ne m’avait jamais fait. Surprise ! Bon, il vaut mieux ça que d’être assommé et stérilisé par l’excès de SO2 et je suis certain qu’il saura se montrer sous de meilleurs auspices lors d’un prochain débouchage, comme il l’a toujours fait jusqu’à présent.

Bon, un regret quand même, celui de ne pouvoir vous faire part de toutes les réactions glanées ici et là sur le salon, de vous raconter les indiscrétions, les potins, les avis officieux parfois bien différents des officiels ;-)), les vacheries, les rumeurs… Ah, si je pouvais tout vous dire ;-)) Enfin, je me souviendrai longtemps de quelques dégustations, où, « backstage », il était hilarant de déguster un vin, comment dire, pour le moins « discutable » en écoutant, derrière le mur, son producteur en faire l’apologie… Mais ce blog n’est pas un journal à scandale et je dois lutter, je le sais, contre ma propension naturelle à jouer à la commère ;-)). Merci à tous ceux qui sont venus déguster. Merci de nous soutenir. Merci de nous encourager à aller toujours plus loin dans notre recherche de la perfection.

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