Vendanges 2023 – Jour J+5 – Little team


Un jour j’écrirai ce blog en anglais. Ou pas. Le confinement a eu ça de bon que j’ai compris que mes fils (je suis certain de l’amour et de l’admiration qu’ils ont pour moi) n’étaient pas dupes de mes faiblesses. Ma fille les connait depuis longtemps. Je vous aime, les enfants.

Que demande un père de plus que de savoir que ses enfants sont dans la réalité de l’image qu’ils ont de lui ? Je vous laisse méditer un moment. Bref, en roulant vers Vingrau lors d’un chassé-croisé garde alternée, une publicité radio mettait en scène des enfants se rendant compte, je crois grâce à des cours de soutien scolaire, que leur père était… d’un « niveau 4ème » en anglais. J’ai tourné la tête, regardé dans le rétroviseur et ils n’ont pu s’empêcher de rire aux éclats tant ils me dépassent dans ce domaine.

Donc, non, je n’écrirai jamais ce blog en anglais mais j’ai bon espoir un jour qu’il soit lu dans d’autres langues tant, au delà de google trad qui a fait d’énormes progrès, mes essais de traduction avec ChatGPT m’ont bluffé…

Et donc ? Dirait amusée ma vieille copine de régiment Isabelle ? Et donc je ne sais pas quoi vous raconter, ou comment je vais le faire, alors je brode en attendant que l’inspiration arrive.

Illustrons ce que pense de mes vendanges l’intelligence artificielle, tiens.

Eh oui.

Et voilà.

C’est comme ça qu’on vendange au Clos des Fées.

En robe de princesse.

Avec des Licornes.

Eh oui. Tranquillou.

Et comme il fait chaud, on est obligé de s’habiller légèrement et parce que je suis un bon patron, je m’occupe bien de mes vendangeuses, qui ont le temps de bavarder dans ce « Barbie world » qu’on va manger pour un moment…

Bon, trêve de plaisanteries.

Désolé de vous décevoir, la vierge suédoise et la licorne ne sont pas venues la nuit dernière mais je me suis bien amusé avec le nouveau soft d’Adobe, Firefly.

Tout le programme est bouleversé, impossible de vendanger à la main ou si peu. On va faire des petites journées, tenter de s’hydrater, de se protéger, crème, chapeaux. Trois heures de vendanges ? Allez, quatre, max.

Il nous reste un morceau de Cinsault. Enfin, il nous reste…on en a qu’un. On pensait en faire un peu de Sorcières Rosé, c’est raté. Le feuillage ne dépasse pas 30 cm, il n’y a pas de feuilles, donc pas de photosynthèse. Les vignes sont bloquées, n’avancent plus, souvent, des grains verts parsèment les grappes.

Inutile de réfléchir bien longtemps, on connait la solution : pressurage direct, grappes entières. Tel quel, une étiquette en post it avec un dessin d’enfant et un nom déglingué. L’histoire d’un mec, un vrai, qui sort de prison pour retrouver ses vignes (il est accusé à tort, bien sûr, par le complot militaro-chimico-industriel), vole un fourgon et fait son vin dedans. On a le vin nature de l’année et « Jailhouse wine » entre illico dans le guide vert de la RVF pendant qu’A.G. parle du héros incompris sur la radio officielle de la Nupes. Un truc à la Romain Gary. La fatigue, je me lâche . désolé. Antoine, c’est de l’humour, hein.

En fait, c’est simple : on fait comme si c’était un blanc. Parfait pour modeste. Du fruit, pas trop de degré, de la couleur, rouge fluo, mais pas trop.

Le jour se lève sur le Mas de la Chique. On est combien ? 16 ? 18 maximum ? Petite équipe, donc. Pas beaucoup pour deux hectares soixante dix. Déjà 30 degrés. On va souffrir. On ne finira pas aujourd’hui, c’est sûr.

Le raisin est brûlant, le jus coule coloré du pressoir. Pour Modeste c’est idéal mais notre petite production annuelle de rosé s’éloigne. Sans un échangeur thermique tubulaire, cette année, la production de rosé blanc gris, taché, comme le monde semble l’adorer (pour combien de temps…), est compromise.

Pour certains coupeurs, c’est la première vendange. La parcelle fait 2,88 hectares, parce qu’à la Chique; à Vingrau, Tautavel, Opoul, les autres dépassent rarement 30 ou 70 ares, parfois 6 ou 15 seulement. 600 m2. Un jardin, un parcelle de lotissement. Taille humaine.

Ici, les rangées semblent n’avoir pas de fin. On a beau s’entraider, tenter d’avancer tous au même niveau, les «rookies» se laissent peu distancer. La distance s’aggrave cep après cep, la solitude est totale. Le dos, les jambes puisent dans leurs réserves, d’autant que les vignes, mal plantées, sont ici particulièrement basses. Le physique, il le faut. Mais sans mental, on décroche. Parfois, c’est la rupture, on ravale son honneur, on rentre, à pied, vers sa voiture et on part, sans rien dire. C’est arrivé.

Aujourd’hui, tous vont tenir, galvanisés par Serge et Tomek qui, en plus de porter, aident en coupant.

Mais parfois, on se sent seul…

Toi, bel ou belle inconnue qui me demandais souvent, par mail ou téléphone : « ah, j’aimerais bien faire les vendanges. Expérience ? Non, pas d’expérience. Du sport de haut niveau, régulièrement ? Mais pourquoi donc ? Quand est ce qu’on mange, il y a un repas assis à midi ? » et autres demandes farfelues, voilà pourquoi, gentiment, je dis NON, aussi doucement que possible et pourquoi tu devrais me remercier pour mon NON…

C’est rude, difficile, ingrat, éreintant, c’est les vendanges. Et crois moi, tu n’es pas prêt. Telle est la voie.

Et toi, aussi, qui sur les réseaux as la critique si facile sur tout ce que tu bois, qui sais mieux que le vigneron lui même ce qu’il aurait dû ou pu mieux faire, certain que tout ça est facile, pense avant de critiquer parfois si violemment, à la force de caractère qui anime les vendangeurs du monde entier (ce qui reste parce que la machine vendange 90 %), jour après jour, année après année, tous ceux autour de moi toute l’année et sans qui , je ne ferais rien.

Merci pour votre engagement lors de ces trois journées infernales.

Ce que j’écoute, au quotidien, au jour le jour mais pas tous les jours…

La citation du jour, mais pas tous les jours…

« Celui qui perd la richesse perd beaucoup. Celui qui perd un ami perd davantage. Mais celui qui perd courage perd tout. » Cervantes

3 commentaires

  • WilliamNichols
    25/08/2023 at 12:39 pm

    Vigneron/conteur-poète/magicien numérique dorénavant, mais surtout Papa aimant aujourd’hui sur le blog qui, si nous n’y serons plus un jour restera un formidable cadeau/repère pour les Tiens mon Cher Hervé
    Je l’ai toujours pensé … que tes Enfants un jour … continues malgré tout … félicitations
    Amitiés et Courage à tous.
    L’un des Deux Frères entrecôtiers

  • Levavasseur
    25/08/2023 at 1:39 pm

    P….. ces rangs, c’est le contraire de la poutre sur le PO! Tu regardes pas au plus loin… juste le cep d’après…et qund tu es au bout du rang… »ouf, ça y est!!! »… »bon, ben au suivant »
    N’empêche que taille, ebourgeonnage, palissage, vendange…ces longs rangs c’est l’enfer! Votre équipe a bien du courage et de la persévérance
    « Messieurs Veuillez ajuster vos chapeaux, nous allons avoir l’honneur de charger! »

  • pax
    25/08/2023 at 7:59 pm

    En Anglais, C’est d’un banal !

    Nous sommes habitués à de plus hautes ambitions surtout quand on précise toutes les fées
    qui se penchent sur le vignoble.
    Elle sont peut être épuisées par les responsabilités qu’on met sur leurs épaules.
    Pour rester à la hauteur de la réputation à laquelle prétend. Le Clos des Fées
    nous proposons une rédaction Espéranto version Braille.

    A ChatGPT rien d’impossible !

    Mais attention, ChatGPT est déjà dépassé.

    Préférez ChatG Roté.

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